3 villes et 8 thèmes de balades littéraires
Suivez vos envies de découverte !
3 villes et 8 thèmes de balades littéraires
Suivez vos envies de découverte !MARSEILLE
Une ville de migrants, une ville étrange pleine d’étrangers. Un exemple extraordinaire de constance dans la transition, marqué par l’histoire du transit, des migrations, du va et vient, et du métissage. À Marseille, le voyageur s’inscrit dans une histoire immémoriale de l’exil et vit entre les mondes et les cultures.
Ecrivains allemands et autrichiens, peintres, musiciens, Surréalistes français, nombreux furent ceux qui, fuyant l’Allemagne nazie à la fin des années 30 et au début de l’Occupation, se réfugièrent à Marseille. Ils fréquentaient les mêmes cafés et habitaient en partie aux mêmes endroits, dans l’attente de leur départ de l’Europe.
Anna Seghers commença à travailler à son roman Transit, qui devait raconter le désespoir des sans-papiers de cette époque. D’autres au contraire, comme Walter Benjamin, essayèrent de sortir de leur propre chef de la souricière dans laquelle ils étaient tous pris.
Sabine Günther a conçu un parcours en 10 étapes sur les traces des exilés à Marseille que vous retrouvez dans son livre Crève-coeur de l’exil. Une promenade littéraire à Marseille.
” Quiconque a passé sa vie dans un pays qui n’a jamais été secoué par des troubles internes, par la guerre ou l’occupation étrangère, ne sait pas le rôle éminemment important que peuvent jouer une pièce d’identité ou un tampon administratif dans la vie d’un homme. En général, il s’agit d’un bout de papier ridicule ou d’un tampon sans importance qu’un scribouillard quelconque a apposé sur un document sans même y pense. Mais il y a des dizaines de milliers de gens, des centaines de milliers, des millions peut-être qui essaient désespérément d’obtenir un tel tampon. ” (Lion Feuchtwanger, Le diable en France)
Ci-contre : L’hôtel-restaurant Aumage dans la rue du relais avant sa rénovation en 2012. Lieu de passage en 1940-41 pour Anna Seghers et ses enfants, et de Soma Morgenstern, ami de Joseph Roth.
Découvrez la riche ville portuaire et son exotisme inégalé avec les yeux du jeune commis Henri Beyle (alias Stendhal), Victor Hugo, Théophile Gautier, Gustave Flaubert, Alexandre Dumas, Gérard de Nerval, Hernri Chopin, George Sand et de l’adolescent Arthur Schopenhauer.
” Le port de Marseille est le plus curieux que j’aie vu, non pas à cause de son panorama, qui s’étend de Notre-Dame de la Garde à la tour Saint-Jean, non pas à cause de ses colibris, de ses perroquets et de ses singes, qui, sous ce beau ciel méridional, se croient encore dans leur patrie, et font du chant, de la voix et du geste, milles gentilles à ceux qui passent, mais parce que le port de Marseille est le rendez-vous du monde entier ; on n’y rencontre pas deux personnes vêtues de la même manière, on n’y rencontre pas deux hommes parlant la même langue. ” (Alexandre Dumas, Voyage dans le Midi de la France)
Le regard différent porté sur Marseille par des illustres voyageurs allemands : Arthur et Johanna Schopenhauer, Frédérique Brun, Achim von Armin, Heinrich Heine, Moritz Hartmann, Ernst Jünger, Joseph Roth, Kurt Tucholsky, Erika, Klaus et Heinrich Mann, Walter Benjamin, Franz Werfel, Anna Seghers et bien d’autres.
” Ce n’est plus la France. C’est l’Europe, l’Asie, l’Afrique, l’Amérique. C’est blanc, noir, rouge et jaune. Chacun traîne son pays à la semelle de ses chaussures et le transporte ainsi jusqu’à Marseille. Mais toutes les terres sont bénies par le même soleil proche, brûlant, très clair ; et sur tous les peuples, la même porcelaine bleue fait une voûte dans le ciel. La mer les a tous porté sur son dos large et chancelant, chacun avait une patrie, ils n’en ont maintenant plus qu’une : la mer. ” (Joseph Roth, Les villes blanches, 1925)
Le philosophe et critique littéraire allemand, Walter Benjamin (1892-1940) jeta dans les années 20 un certain regard sur la ville lors de ses flâneries sous l’influence du haschich. Mais ce n’est pas tout – Marseille est devenu pour Walter Benjamin une ville-destin. Suivez avec nous les traces de ce penseur majeur du XX° siècle.
” La lumière de magasins de primeurs qu’on trouve dans les tableaux de Monticelli provient des rues du centre de la ville, des monotones quartiers résidentiels de ceux qui sont vraiment installés ici et qui savent quelque chose de la tristesse de Marseille. Car l’enfance est le sourcier du chagrin, et pour connaître la mélancolie de villes si glorieusement rayonnantes il faut y avoir été un enfant. Les maisons grises du Boulevard Longchamp, les grilles des fenêtres du cours Puget et les arbres de l’allée Meilhan ne trahiront rien au voyageur si un hasard ne le conduit pas à la chambre mortuaire de la ville, au Passage de Lorette, la cour étroite où le monde entier, devant quelques femmes et hommes ensommeillés se rétrécit aux dimensions d’un seul après-midi dominical. ” (Walter Benjamin, Images de pensée)
Nous rendons hommage au grand poète et acteur Antonin Artaud, né à Marseille en 1896 dans le quartier des Chartreux où il a vécu jusqu’à l’âge de 20 ans. Il était fortement influencé par les origines méditerranéennes de sa famille et leur restait fidèle jusqu’à la fin de sa vie.
” Je savais que j’avais toujours souffert de l’être et d’être parce que je n’ai jamais voulu être un résigné comme les autres…. Je me souviens à l’âge de 6 ans dans une maison du Boulevard de la Blancarde à Marseille (n° 59 exactement) m’être demandé à l’heure du goûter, pain chocolat une certaine femme dénommée mère me donnait, m’être demandé ce que c’était, que d´être et vivre.” (Antonin Artaud, Lettres de Rodez)
ÉCRIVAINES, FÉMINISTES ET AVENTURIÈRES
Madeleine de Scudéry, George Sand, Flora Tristan, Simone Weil, Mary Jayne Gold, Anna Seghers et Simone de Beauvoir nous racontent leur Marseille et y jettent un regard différent, pas toujours tendre.
” Plus je vois cette ville de Marseille et plus elle me déplaît. – Cette ville n’est pas française. Il y a ici un ramas de toutes les nations. – C’est une espèce de Gibraltar, de Barcelone, de Bruxelles, de Nouvelle-Orléans. – La majorité des négociants de cette ville ont une origine peu honorable. – Ce sont en général de banqueroutiers de tous les pays. – Un Italien, un Grec, un Turc, un Africain, et tous ceux de la côte du Levant – ont-ils fait chez eux de mauvaises affaires, ou ont-ils sur leur compte quelques mauvais reliquaires : ils viennent à Marseille. Le climat et le genre de commerce les attirent. – Ces barbares de différents pays apportent dans leurs habitudes mercantiles des manières de faire plus ou moins juives et arabes – il résulte de cela que le commerce ici, en fait de fraude, de ruses, de fourberies ne le céde en rien aux plus grands forbins mercantiles du globe. ” (Flora Tristan, Notes durant son tour de France en 1843)
AIX-EN-PROVENCE
Paul Cézanne et Émile Zola
AIX-EN-PROVENCE
Paul Cézanne et Émile ZolaCézanne, le fils d’Aix-en-Provence le plus célèbre, a été maudit par ses contemporains aixois. Sur les traces du peintre et son ami de jeunesse Émile Zola. ” Tout dans la nature se modèle sur la sphère, le cône et le cylindre, il faut apprendre à peindre sur ces figures simples, on pourra ensuite faire tout ce qu’on voudra.” (Paul Cézanne, Lettre à Emile Bernard, 1904) Ci-contre : Paul Cézanne devant son atelier, photographié en 1906 par Gertrude Osthaus.
Sanary-sur-Mer
La littérature allemande en exil
Sanary-sur-Mer
La littérature allemande en exilCette pittoresque ville-port sur la Côte dʻAzur accueillit entre 1933 et 1940 de nombreux artistes et écrivains allemands et autrichiens qui venaient de fuir l’Allemagne nazie : Lion Feuchtwanger, la famille de Thomas Mann, Franz et Alma-Mahler Werfel, René Schickele, Franz Hessel, Friedrich Wolf et bien d’autres. Depuis les années 1990 un parcours de mémoire existe à Sanary avec des textes et des photos devant les maisons des exilés. Pour raconter la captivante histoire de la communité d’émigrants à un jeune public, nous avons développé un parcours d’exil à travers Sanary, dans lequel il s’agissait, comme dans un véritable jeu de piste, de trouver les lieux des écrivains de l’exil et, en se fondant sur des extraits de textes, de rendre à nouveau vivante l’atmosphère de cette époque de l’exil. ” En exil, le café devient maison et pays natal, église et parlement, désert et champ de bataille, ainsi que le berceau des illusions et le cimetière. L’exil rend seul et tue. Et pourtant il redonne vie aussi et donne de nouvelles forces. En exil, le café devient le seul lieu de ralliement permanent. Je me suis assis dans les cafés d’une douzaine de terres d’exil, et c’était toujours le même café, en bord de mer, entre des montagnes, à Londres, à Paris, dans les ruelles d’Amsterdam, ou au milieu des couvents de Bruges. J’étais assis au café de l’exil et j’écrivais. ” (Hermann Kesten) Ci-contre : August Sander, portrait du peintre Anton Räderscheidt (1927). Il émigrait dans les années 30 à Sanary-sur-Mer.